Pour ce faire, le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie définit trois catégories de population : les 20% qui perçoivent les plus hauts revenus, les 20% qui perçoivent les plus bas et les "classes moyennes", soit les 60% situés entre ces deux groupes. A noter que le CREDOC analyse les modes de vie des Français depuis 1979 auprès d'un échantillon représentatif de 2.000 personnes interrogées en face-à-face, renouvelé chaque année et réalisé selon la méthode des quotas. Ce chapitre sur le chômage, le pouvoir d'achat et le logement s'inscrit dans une enquête plus large sur les conditions de vie et aspirations des Français à paraître en janvier 2008.
En matière de chômage, alors que 6% des hauts revenus déclarent être sans emploi (un chiffre stable depuis 25 ans), le CREDOC note une forte hausse de la proportion d'individus au chômage chez les bas revenus (ils étaient 10% en 1980, ils sont 34% en 2007) et les classes moyennes (3% en 1980 et 12% en 2007, avec un pic de 19% en 1998).
En matière de pouvoir d'achat, 76% des bas revenus et 69% des classes moyennes affirment s'imposer régulièrement des restrictions sur un ou plusieurs postes de leur budget (contre 37% des hauts revenus). Ce sont également ces deux catégories qui ont le plus ressenti une dégradation de leur niveau de vie sur ces dix dernières années, avec 30% des bas revenus et 23% des classes moyennes ayant une impression négative. Un constat corroboré le mois dernier par l'INSEE et, plus récemment, par la Commission européenne dans son dernier rapport sur l'emploi, très peu médiatisé alors que le sujet est particulièrement sensible pour notre gouvernement actuel...
En matière de logement, 55% des bas revenus et 48% des classes moyennes jugent que ce poste constitue une charge "lourde ou très lourde" dans leur budget (ils ne sont que 26% à le penser chez les hauts revenus). En ce qui concerne l'accès à la propriété, les inégalités se sont creusées ces 25 dernières années avec 33% des bas revenus et 46% des classes moyennes qui sont propriétaires de leur logement ou accédant à la propriété en 2007 contre… 70% des hauts revenus : le CREDOC précise qu'en 1980, la proportion de Français propriétaires de leur logement était similaire dans les trois catégories, puis l'écart a commencé à se creuser dans les années 90.
Autre résultat peu étonnant en matière de patrimoine : seuls 9% des bas revenus et 12% des classes moyennes disposent de valeurs mobilières en 2007, contre 36% des hauts revenus.
Au final, ce sont les classes moyennes qui se montrent les plus inquiètes pour l'avenir avec 76% d'individus qui pensent que leurs enfants auront un niveau de vie inférieur au leur, contre 70% des bas revenus et 71% des hauts.
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Commentaires
Avec un taux de 15% de salariés payés au Smic, la France est de très loin le pays d'Europe où le pourcentage de travailleurs "abonnés" au salaire minimum est le plus important, et où la distribution des salaires est la plus concentrée vers le bas de l'échelle. Cocorico ! Répondre | Répondre avec citation |
Quels sont les éléments sur lesquels on assiste à une convergence entre catégories sociales ?
Cette étude montre effectivement, dans certains cas, une relative convergence des modes de vie entre les hauts revenus, les bas revenus et les "classes moyennes" depuis 25 ans. C’est vrai pour quelques biens d’équipement tels que la télévision, le magnétoscope ou le téléphone mobile. Pour l’ordinateur et Internet, en revanche, le fossé numérique reste encore important entre les différentes catégories de revenu. On assiste également à une certaine démocratisation des pratiques culturelles depuis le début des années 1980, les Français étant par exemple de plus en plus nombreux à fréquenter les bibliothèques ou les salles de cinéma. Convergence encore en matière de relations sociales : recevoir des amis ou des relations chez soi était plutôt l’apanage des hauts revenus au début des années 1980, c’est aujourd’hui une pratique beaucoup plus répandue.
Quels sont les éléments sur lesquels on diverge de plus en plus ?
D’autres éléments témoignent plutôt une divergence entre le haut et le bas de l’échelle des revenus. En matière de logement, par exemple, les classes moyennes éprouvent de plus en plus de difficultés à devenir propriétaire depuis le milieu des années 1990 ; la situation des bas revenus s’est dégradée encore plus franchement (parmi les 20% de la population percevant les plus bas revenus, seule une personne sur trois est aujourd’hui propriétaire de son logement, contre une sur deux en 1992) ; dans le même temps, le taux d’accès à la propriété est passé de 65 à 70% chez les hauts revenus. Corrélativement , les inégalités de patrimoine ont cru fortement depuis 25 ans, à la fois en matière de produits financiers (portefeuille d’actions, placements d’épargne liquide, assurance-vie) ou de biens fonciers ou immobiliers : les hauts revenus ont ainsi vu leur situation nettement s’améliorer, tandis que les bas revenus n’ont pas pu profiter des augmentations de prix de l’immobilier ou de l’appréciation des valeurs mobilières.
Ces évolutions s’accompagnent d’un malaise grandissant parmi les classes moyennes et les bas revenus qui ont l’impression, depuis 25 ans, que leur niveau de vie s’est dégradé. Ces groupes expriment, tout au long de la période 1980-2007, un fort sentiment de restrictions budgétaires tandis que les hauts revenus sont de moins en moins nombreux à ressentir les contraintes financières. Enfin, des divergences se font jour en matière de santé : depuis la fin des années 1990, les bas revenus, ainsi que les classes moyennes, ont de plus en plus souvent l’impression que leur état de santé s’est dégradé ; les bas revenus déclarent d’ailleurs de plus en plus souvent souffrir d’insomnies, d’état dépressif ou de maux de tête ; chez les hauts revenus, ces souffrances déclarées ont tendance à diminuer au cours du temps.
Est-ce qu’il y a une singularité des "classes moyennes" ?
Une des spécificités des classes moyennes réside dans l’ambivalence de leurs aspirations : avec, d’un côté, l’espoir de s’élever dans la hiérarchie sociale — ce qui était plus souvent possible au cours des Trente Glorieuses lorsque la croissance économique était très élevée ; et, de l’autre, la peur du déclassement : près des ¾ des classes moyennes craignent aujourd’hui que leurs enfants n’atteignent pas un niveau de vie aussi élevé que le leur. Même si, en moyenne, ces catégories de la population sont moins touchées par la précarité de l’emploi que ne le sont les bas revenus, elles se montrent plus inquiètes face à la la trappe du chômage.
Propos recueillis par Louis MAURIN Répondre | Répondre avec citation |