Le premier acte de la renégociation de la convention d'assurance-chômage 2009-2011 s'est tenu hier après-midi au siège parisien du Medef. Les enjeux sont multiples : accompagnement des chômeurs, indemnisation des jeunes, des précaires, des intermittents du spectacle et des saisonniers, refonte des filières… autant de questions qui devront être abordées dans un contexte économique et financier tendu.
«Le régime d'assurance chômage reste calqué sur une vision un peu industrielle du marché du travail où l’on protège mieux les hommes, les carrières longues et les licenciés économiques que les jeunes, les femmes ou les précaires», a déclaré lundi Carole Tuchszirer, chercheuse au Centre d'Etudes de l'Emploi (CEE) au cours d'une table-ronde de l'Association des journalistes d'information sociale (Ajis). Or «l’indemnisation est l'une des conditions du retour à l'emploi, comme le prouve le modèle scandinave», a-t-elle rappelé, espérant «une remise à plat du régime d'assurance chômage» et trouvant que «la conjoncture et le contexte ont bon dos» pour justifier un probable statu quo...
La «double peine pour les entreprises». Pour l'instant, le patronat fait dans le court terme et ne s'intéresse qu'à la proposition du gouvernement consistant à baisser les cotisations chômage (- 0,3% en 2009, - 0,4% en 2010 et - 0,3% en 2011) au profit des cotisations retraite, sous prétexte que le déficit de l'assurance vieillesse, qui s'élève aujourd'hui à 5 milliards d’€, va continuer à se creuser. Pourtant, celui de l'Unedic en est exactement au même point et le chômage doit, lui aussi, continuer à remonter jusqu'en 2010.
Alors que les partenaires sociaux de l'Unedic désapprouvaient unanimement cette mesure, Bercy s'est livré à un chantage en règle, imposant illico la hausse de 0,3% des cotisations vieillesse sur la part patronale. «En revanche, si les partenaires sociaux décident de baisser les cotisations chômage sur les parts salariale et patronale, nous pourrons ajuster la hausse des cotisations retraite en augmentant la part salariale et en limitant la hausse de la part patronale de façon à ce que l'opération soit neutre», a-t-il été expliqué. La manœuvre a fonctionné : le camp patronal ainsi pris en tenaille, la belle unité s'est aussitôt effondrée !
Du coup Patrick Bernasconi (Medef), chef de file de la délégation, a tranché : malgré la remontée annoncée du chômage, il continue de prôner «une baisse des cotisations» pour «redonner de l'air aux entreprises». «La conjoncture fragilise tout particulièrement les TPE-PME. [...] Il est plus que jamais impératif d'utiliser toutes les possibilités de baisser les charges. [...] Toute nouvelle charge risque de se traduire par des destructions d'emplois et il est impératif de baisser les prélèvements sur les entreprises», a renchéri la CGPME. Sous réserve de «demander d'autres simulations financières à l'Unedic» car ses prévisions, dévoilées hier, sont jugées trop optimistes : même Laurence Parisot a souhaité qu'elles soient complétées avec une hypothèse… de croissance nulle en 2009.
Positions syndicales. Pour la CGT, «dans la situation actuelle, ce serait une attitude irresponsable». «Ce n'est vraiment pas le moment. [...] Nous ne pouvons pas réduire la voilure quand on sait que la situation de l'emploi va se dégrader. La priorité est moins à la baisse des cotisations qu'à l'amélioration de l'accompagnement», a abondé la CFDT.
Pour la CFTC, «l'assurance-chômage doit s'adapter aux récentes évolutions de l'emploi et prendre en compte la précarité». Elle en appelle à la «responsabilité sociale» des entreprises qui, utilisant toujours plus de contrats précaires, se doivent de financer davantage le nouveau système. Rappelant que la majorité des inscriptions à l'ANPE résulte de fins de CDD et de missions d'intérim qui induisent un chômage récurrent (la précarité coûte chaque année 7 milliards d’€ à l'Unedic et ne lui rapporte qu'un milliard), la CGT a remis sur le tapis la taxation des employeurs qui en abusent : elle propose une modulation des cotisations patronales en fonction des types de contrats.
Elle souhaite également une «refonte totale» du système : deux filières d'indemnisation (une pour les salariés ayant travaillé 12 mois d'affilée, et une pour les précaires ayant travaillé moins de 12 mois sur les 60 derniers mois), ainsi qu'un revenu de remplacement au moins égal à 80% de l'ancien salaire. De leur côté, la CFTC et la CFDT prônent une «filière unique» (au lieu de quatre actuellement) calquée sur le principe «une semaine de travail = une semaine indemnisée» et déclenchable à partir de 4, 5 ou 6 mois d'activité, avec un plafond d'indemnisation de 25 à 30 mois.
Enfin, alors que moins d'un privé d'emploi sur deux est aujourd'hui indemnisé par le régime, «nous voulons améliorer l'indemnisation des chômeurs et augmenter le nombre de bénéficiaires, plaide FO. Il s'agit de respecter l'esprit de l'accord sur le marché du travail que nous avons signé en janvier».
Les prochaines réunions doivent se tenir les 7 et 25 novembre, puis s'accélèreront après les élections prud'homales du 3 décembre où les dates du 5, 9, 16 et 23 décembre sont fixées. Certains syndicats n'ont pas exclu une rallonge en janvier, sachant que l'actuelle convention expire au 31 décembre.
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