L’objectif du CLU (Contrat local unique de lutte contre la fraude) est de limiter les cas en facilitant la circulation de l’information et le croisement des fichiers entre les services de l’Etat et les organismes de prestations sociales. Lire ici le détail de cet impressionnant dispositif...
Le plus drôle, c'est que la très rurale Dordogne est considérée comme l'un département les plus pauvres de France : sur 390.000 habitants, 14% vivent avec moins 780 € par mois et 10% avec moins de 560 €. Ils seront donc les cobayes d'une chasse aux «assistés» déclarée par un gouvernement hautement hypocrite, plus soucieux du «train de vie» des RMistes que de la délinquance en col blanc ou les paradis fiscaux.
La propagande bat son plein
«Augmentation de 73% des fraudes recensées par la CNAF en 2007 !», pouvait-on lire dans la presse le mois dernier. Pourtant, sur les 66 milliards d’€ de prestations sociales versées à ses allocataires, le taux de «fraude» a été évalué à 0,1% seulement. Sur les 6.314 «cas» épinglés, la fraude avérée — dissimulations de concubinage, escroqueries, faux et usage de faux — ne représentait que 38% des dossiers, le reste (62%) consistant en «indus» — donc de probables erreurs de la CAF elle-même — et en «déclarations d'activités ou de ressources non à jour», que l'on ne peut considérer comme des malversations. Mais le message est passé : «Les fraudes aux allocations familiales explosent !», titrait Le Figaro du 24 septembre.
Parmi les prestations les plus «fraudées» on signale, bien sûr, ce satané RMI qui, pourtant, ne pèse que 6 milliards sur les 66 versés au total par la CNAF... Que le RMI ait constitué 28% des «cas» est tout à fait logique dans la mesure où son versement est conditionné par une déclaration de ressources trimestrielle qui induit des régularisations plus fréquentes, complexifiées en cas de reprises d'activité… que l'on sait essentiellement réduite.
Qui sont les plus «assistés» ?
58,4 millions de préjudice/régularisations : on est très loin des 200 «évadés» français du Liechtenstein qui ont à eux seuls réellement détourné 1 milliard d’€, tandis qu'à leur sujet le ministre du Budget et les médias ont fait preuve d'une grande discrétion... Encore plus loin des scores de la fraude fiscale qui représente un manque à gagner de 50 milliards d’€ par an pour les caisses de l'Etat, soit l'équivalent de son déficit public. On rappelle que si le RMI coûte 6 milliards d’€ par an à la CAF et l'indemnisation du chômage environ 23 milliards à l'Unedic, ces prestations sociales, issues des cotisations des salariés et de leurs employeurs, n'ont rien à voir avec le budget de l'Etat, issu notamment de l'impôt. Or l'Etat accorde chaque année quelque 65 milliards d’€ d'aides publiques aux entreprises sans contrôle ni contrepartie sur l'emploi, et s'est privé en 2007 de 73 milliards d’€ de recettes par le biais de 486 niches fiscales qui ont permis à des contribuables aisés — dont 150 millionnaires ! — d'échapper à la solidarité nationale.
Mais la stigmatisation des faibles est un précieux écran de fumée qui vise à détourner les regards du déséquilibre croissant (et organisé) de la répartition des richesses : comme le chômage et la misère profitent aux entreprises privées et à leurs actionnaires, la fraude fiscale et sociale profite à une élite qu'il n'est pas question de trop incommoder.
Une lutte disproportionnée
Attention : nous ne contestons pas la nécessité de combattre la fraude et les 58 millions d'euros récupérés par la CNAF sont une bonne chose, tout comme les 150 millions récupérés par l'assurance chômage ou les 120 millions par l'assurance maladie. Des montants qui, notez-le bien, restent infimes en comparaison des fuites considérables détectées par ailleurs.
Ce que nous dénonçons, c'est la focalisation obsessionnelle qui s'opère volontairement sur les plus démunis, dont la majorité de ceux qui franchissent le pas le font pour survivre alors que, chaque année, c'est par dizaines de milliards que le fisc ou l'URSSAF se font plumer : ces fraudeurs d'une toute autre espèce, constitués d'entrepreneurs malhonnêtes ou de contribuables avertis, sont, eux, loin d'être pauvres !!! Et là, nous ne pouvons que déplorer l'absence de mesures volontaristes et concrètes de la part de l'Etat afin de lutter contre ce phénomène particulièrement méprisable, et surtout mille fois plus préjudiciable à son bon fonctionnement.
Mais à l'image d'un Bernard Accoyer qui suggère d'amnistier des hors-la-loi alors que son parti se veut impitoyable vis-vis de ceux qui souffrent, nous avons affaire à un Etat qui, au nom d'une certaine justice (qui n'est visiblement ni fiscale, ni sociale), criminalise les plus modestes pour mieux disculper les nantis.
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