Publiée tous les ans depuis 2002, l'enquête sur les «besoins en main-d'œuvre», menée en partenariat avec le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (Crédoc), permet à l'Unedic de planifier ses budgets et ses actions à venir, l'objectif étant de se mettre au service des entreprises après avoir défini leurs besoins, de diriger les chômeurs sur les emplois offerts, et d'adapter le financement des formations aux métiers en mal de personnel.
Chaque fin année, Pôle Emploi adresse son questionnaire à ses 1,6 million d'établissements affiliés à l'assurance chômage, hors fonction publique. Ce document les interroge sur leurs intentions d'embauche, le type de postes qu'elles comptent proposer dans les mois qui viennent, et sur leurs "difficultés de recrutement".
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Et, chaque année, la proportion d'entreprises qui ont daigné lui répondre ne dépasse pas 25% (environ 400.000). Malgré une zone d'ombre qui couvre les trois quarts de l'enquête, Pôle Emploi publie ses résultats au printemps suivant, ceux-ci étant censés refléter la tendance de l'exercice en cours. Parole d'évangile, ils sont relayés dans la presse.
Or, comment peut-on prétendre se faire une idée de ce qui se trame avec 75% de non réponses ? (Plus grossièrement, considère-t-on qu'un scrutin est valable ou légitime avec un taux d'abstention de 75% ?) Jusqu'à présent, les prédictions des précédentes enquêtes BMO — uniquement basées sur des intentions — sont demeurées aléatoires, sinon vaines. Dans le contexte actuel de crise où les entreprises n'ont aucune visibilité, comment cette enquête, qui s'appuie sur un taux de réponse aussi faible et laisse de côté un vaste trou noir, pourrait-elle être digne de foi ?
Moins d'embauches, mais plus de postes ?
Cette onzième édition confirme que la propension des entreprises à recruter diminue depuis 3 ans. Puis elle nous livre le paradoxe suivant : si la proportion des entreprises qui envisagent de recruter en 2012 continue de reculer pour tomber sous les 18%, le nombre de postes envisagés augmente, lui, de 4% à 1,6 million. Une aberration que personne n'explique : voir en commentaire.
Selon l'enquête, la majeure partie des projets annoncés (36%… des 25%) font suite à l'anticipation d'un surcroît d'activité. Et pour achever de nous rassurer, elle nous dit qu'un peu plus de la moitié des postes proposés seront des emplois durables : 36% de CDI, et 15% de CDD de six mois ou plus. Sans surprise, ce sont les mêmes secteurs qui vont recruter : hôtellerie-restauration et services, nettoyage (temps partiel ?), animation socio-culturelle (précaires ?), secteur agricole (saisonniers).
Ces emplois sont-ils qualifiés et correctement rémunérés ? Quel est le volume d'heures attachées à ces "projets de recrutement" ? Toute dévouée aux employeurs, l'enquête ne le dit pas. Par contre, elle se fait leur porte-parole en agitant l'épouvantail des offres non pourvues, relayant la complainte de ceux qui ont bien du mal à trouver la perle rare... Si certains invoquent aveuglément "l'inadéquation des profils aux postes" ou "une pénurie de candidats", d'autres admettent cependant des difficultés liées aux conditions de travail et à un déficit d'image de l'entreprise, du secteur ou du poste : ceux-là sont sur la bonne voie.
SH
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Commentaires
Voila une question naturelle qui n'est pas souvent posée ! Bravo !
PS : Et encore dans les 25% qui répondent, faudrait voir qui dans l'entreprise s'y est collé et avec quelles bonnes lunettes. Répondre | Répondre avec citation |
à méditer Répondre | Répondre avec citation |
http://bmo.pole-emploi.org/ Répondre | Répondre avec citation |
C'est vrai que 25 % c'est peut-être pas si mal en nombre mais de là à dire que ce qui en ressort de l'étude est "coulé dans le bronze", j'ai des doutes.
Surtout avec les conclusions hâtives que des journalistes en tirent. Les entreprises n'ont certainement pas juré qu'elles choisiraient des chômeurs pour ces postes à pourvoir. Ce n'est pas le moindre des problèmes…à mon avis. Répondre | Répondre avec citation |
En règle générale, ces «intentions» d'embauche ne profitent pas aux chômeurs. En effet, 4 sur 10 correspondent à des transferts de personnel au sein de la même entreprise (promotion interne, remplacement des départs à la retraite…), 3 sur 10 concernent des salariés qui changent d'entreprise (mais pas de métier ou de branche) quand seulement 2 sur 10 profitent à des privés d'emploi ou à des inactifs, et 1 sur 10 permettent à des jeunes d'entrer enfin sur le marché du travail. Ces chiffres datent de l'Enquête BMO de 2009 :
www.actuchomage.org/200904104557/Social-economie-et-politique/Enquete-BMO-2009-une-degradation-previsible.html Répondre | Répondre avec citation |
Nous "On sait "mais les médiateurs de l'information ne semblent pas le savoir, eux ! Répondre | Répondre avec citation |
C'est pareil avec Sarko qui voulait une France du "vrai travail" et pas une France de "l'assistanat" : il a toujours fait comme s'il y avait des emplois pour tout le monde tout en sachant parfaitement que c'est loin d'être le cas.
C'est pareil avec les "offres non pourvues" : la droite et le patronat font en sorte de faire croire que les victimes du chômage sont consentantes. Quand on arrive à convaincre les chômeurs qu'ils sont des fainéants parasites responsables de leur situation, que c'est de leur faute s'ils ne trouvent pas d'emploi, on débarrasse du coup les politiques et les entreprises d'une responsabilité écrasante. Et cette imposture idéologique leur permet de garder le pouvoir.
C'est aussi comme Pôle Emploi qui supprime le SMP pour mettre en place trois nouveaux niveaux d'accompagnement pour les chômeurs, la belle affaire ! Or, ce n'est pas Pôle Emploi qui créé les emplois et tant que les emplois manquent, ils savent qu'ils brassent du vent. Mais cette mystification leur permet de conserver… leurs emplois à eux. Répondre | Répondre avec citation |
Hélàs beaucoup de personnes en France pensent que c'est de notre faute, que si on a envie de travailler, on trouve.
Ces réflexions viennent de la part de personnes qui n'ont jamais vécu le chômage et ne peuvent pas comprendre ou plutôt ne veulent pas comprendre. C'est simple, je les ignore ces personnes et ne leur accorde aucune considération. Répondre | Répondre avec citation |
(Il existe certainement des gens plus optimistes que nous…) Répondre | Répondre avec citation |
www.actuchomage.org/Les-dossiers/les-dix-strategies-de-la-manipulation-de-masse.html
Mais nous, ici, on n'y croit pas. Ce n'est pas que nous soyons "pessimistes" (en opposition aux "optimistes") : nous sommes réalistes et surtout, nous avons l'esprit critique. Répondre | Répondre avec citation |
Nous, pas. Répondre | Répondre avec citation |
Manque de chance ces métiers sont souvent peu qualifiés et peu attrayants, les employeurs avouent même envisager faire venir des personnes de l'étranger pour occuper les postes… Répondre | Répondre avec citation |
Je ne veux pas me faire l'avocat de Pôle Emploi car, en effet, les limites méthodologiques de l'enquête sont incontestables - même si rien n'interdit de penser que le ¼ d'employeurs qui s'est exprimé reflète également l'opinion de la majorité silencieuse.
Néanmoins, la réponse à votre question se trouve tout simplement dans l'étude. Moins d’entreprises recrutent, mais celles qui recrutent le font pour + de postes :
- la part des établissements recruteurs recule (-0,3%)
- les établissements recruteurs sont + ambitieux : en moyenne 3,9 projets par établissement recruteur en 2012 contre 3,6 en 2011.
Bref, la densité bat le volume, en quelques sortes.
En ajoutant les données sur la taille des employeurs, j'en conclue que + l'employeur est "gros" + il recrute et les TPE-PME restent à l'écart de l'embellie annoncée.
Me gourre-je? Répondre | Répondre avec citation |
lexpansion.lexpress.fr/economie/ce-qu-il-faut-savoir-sur-les-embauches-en-2012_293957.html Répondre | Répondre avec citation |
Hélas, le travail du journalisme d'information quotidienne repose en effet avant tout sur la régurgitation de communiqués pour publier aussi vite que possible… On en a vu, des cas où des informations erronées étaient longtemps reprises et présentées comme des faits établis. La défaite de la pensée…
Par exemple, quelqu'un s'était amusé à inventer un joueur sur un forum de supporters de football : celui-ci a fini par avoir une existence propre dans France Football ! Bref, le téléphone arabe…
Blague à part, c'est aussi à ça que sert l'Atelier de l'Emploi, qui préfère prendre le temps de l'analyse plutôt que courir contre la montre pour être le premier à publier ;-)
Article à venir incessamment, donc !
Merci de contribuer à l'esprit critique - donc à la connaissance. Bien cordialement. Répondre | Répondre avec citation |
Encore merci à vous ! Répondre | Répondre avec citation |
Et quand à l'existence d'un faux joueur sur France football, faut vraiment être un pekin moyen pour savoir que ça existe.
Mais c'est pas pour autant que regarder le foot à la télé soit une insulte.
Blagues à part,
je me demande bien qui sont ces très grosses entreprises qui recrutent autant et qui sont dans l'hôtellerie-restauration et services, le nettoyage, l'animation socio-culturelle et le secteur agricole. Répondre | Répondre avec citation |
Je ne me fie en aucun cas à ces études. Au moment où elle a été lancée et celui où elle est diffusée, le monde a avancé. Répondre | Répondre avec citation |
Heu, si c'ette étude a une crédibilité zéro ou proche ( N'avez-vous aucun doute sur le fait que la modèlisation découlant de ces "déclarations" corresponde à la réalité effective ?) comment peut-elle être susceptible de donner une réponse fiable ?
J'aimerais bien que ceux qui en rédigés par le passé s"expriment mais bon, ils ont peut-être encore un job. Répondre | Répondre avec citation |
Et puis la litanie des "recrutements difficiles" devient franchement insupportable. Répondre | Répondre avec citation |
Citer:
www.francoisegri.com/870-un-appel-des-grands-patrons-aux-candidats-pariez-sur-lentreprise Répondre | Répondre avec citation |
Bref, de mon côté, je pars du principe qu'il vaut mieux nommer une réalité, aussi gênante et aberrante soit-elle, plutôt que la cacher parce qu'elle est choquante. Malgré les limites méthodologiques de l'enquête, le fait que la litanie des compétences difficiles à trouver soit désormais installée suffit, à mon sens, à considérer que le mal existe. Sa coexistence avec un chômage inacceptable ne rend la mobilisation que plus indispensable, non? Répondre | Répondre avec citation |
Je n'en mettrais pas ma main au feu.
Je vois des entreprises exigeant des candidats non seulement diplômés dans leur métier mais en sus formés à l'utilisation d' outils ou de méthodes de management très précis. Ces formations rarement présentes dans la base CARIF sont souvent hors de prix pour un chômeur et non conventionnées. Répondre | Répondre avec citation |
Pourtant, sont responsables de ce paradoxe :
• nombre d'employeurs qui sous-paient et maltraitent leurs salariés. On appelle ça "des difficultés liées aux conditions de travail et à un déficit d'image".
• la gestion de la formation professionnelle en France, et particulièremen t celle des chômeurs, qui est une honte.
• à nouveau les employeurs qui ne se donnent plus la peine de former leurs salariés et attendent que leurs nouvelles recrues soient des moutons à 5 pattes payés au Smic et opérationnels de suite.
J'en oublie certainement… Répondre | Répondre avec citation |
Certainement ! Il se pourrait qu'il ait besoin de posséder un véhicule et aussi un bon quotient émotionnel pour bien s'adapter aux réorganisations qui ne vont pas tarder à venir … Répondre | Répondre avec citation |
"Assez curieusement, écrit-il, ces perspectives ne semblent jamais confrontées aux réalités et les projections se succèdent, chaque année, sans que soient analysée (ou au moins publiée) la pertinence des prévisions effectuées l’année précédente. Il serait pourtant nécessaire de savoir quel est le degré de fiabilité de la prévision de l’année précédente, pour pouvoir le cas échéant relativiser l’impact de ce travail. Car l’enquête compare les perspectives, met en évidence leurs évolutions, sans jamais les comparer à la réalité. Cela donne l’impression d’un travail restant pour l’essentiel dans le champ du virtuel, en évitant soigneusement de se confronter avec le réel."
alternatives-economiques.fr/blogs/abherve/2012/05/11/a-quoi-sert-lenquete-besoins-de-main-doeuvre-de-pole-emploi/ Répondre | Répondre avec citation |
Ce que je trouve peu pratique pour un DEc'est que l'étude n'est pas basée sur les nouveaux ROME. Et ans certains cas ce qui est appelé un métier correspond en réalité à plusieurs (et de tous grades) ce qui diminue l'intérêt. . Répondre | Répondre avec citation |
http://www.pole-emploi.org/communication/enqu-te-complementaire-bmo-2011-@/communication/563/view-article-18.html? Répondre | Répondre avec citation |
Cela débute par ceci 'Avec 6 mois de recul par rapport à la précédente interrogation en décembre 2010, les établissements envisagent, en juin 2011, ,3 131 500 recrutements pour l’ensemble de l’année 2011, soit plus du double du nombre total de projets initialement prévus.Une telle variation d'intentions me laisse songeur… Répondre | Répondre avec citation |
Les offres d'emploi les mieux rémunérées sont celles que passent les agences intérims.
Ne viendrait pas à l'idée d'un employeur de procéder à un recrutement de gens hautement qualifiés. Celle-ci sont pourvues directement sur leurs sites propres ou voir par le biais de cabinet de recrutements.
Ils ont jours deux ans de retard en rapport avec les réalités économiques.
Bref on y trouve beaucoup de sous emplois et salaires en conséquences. Répondre | Répondre avec citation |