Hier soir, à "C dans l'air" sur France 5, l'inénarrable Michel Godet, économiste et professeur au CNAM, avouant que son salaire d'universitaire en fin de carrière s'élevait à 5.000 €, disait que pour la plupart des Français, «celui qui est riche, c'est celui qui gagne plus que moi»... Un postulat qui vaut non seulement pour l'ouvrier en fin de carrière (1,3 Smic) mais pour lui-même, et surtout ceux qui nous gouvernent.
Il serait cependant plus subtil de dire que les riches tendent à surestimer les revenus des moins aisés — y compris des plus pauvres — et que ces derniers sous-estiment les revenus des plus riches.
Par exemple, le 19 mai dernier, le député Hervé Mariton déclarait aussi gagner 5.000 € (alors que ce menteur en touche 6.700, sans compter les nombreux avantages dont il bénéficie…) : «Je ne me considère pas comme riche; c'est le revenu d'un cadre moyen». Or, selon l'Insee, le salaire mensuel moyen de l'ensemble des cadres ne dépassait pas 4.000 € en 2007-2008, avec une fourchette oscillant entre 2.800 et 6.300 € net...
Tous déconnectés des réalités !
Sur le blog Intox2007, on découvre un graphique de l'Insee où il apparaît clairement qu'en 2006, soit deux ans avant la crise, 95% des salariés du privé exerçant à temps complet touchaient moins de 4.040 €. A partir de 90% (soit les 10% qui gagnent plus de 3.077 €), la courbe devient élastique et les plus hauts salaires s'envolent de manière exponentielle.
De 2000 à 2007, les revenus du travail n'ont progressé que de 11% alors que les revenus du patrimoine ont, eux, quasiment doublé. Rappelons aussi que depuis 2002, les 0,01% des foyers les plus riches ont vu leur revenu réel croître de 42% contre seulement 4,6% pour les 90% des foyers moins aisés. De sorte qu'en 2010, selon l'Insee, les 10% des Français les plus riches détiennent 46% de la masse totale du patrimoine. Grâce à la politique fiscale instaurée alors par Dominique de Villepin, ils sont moins imposés qu'ils ne devraient l'être, et le manque à gagner pour les recettes de l'Etat serait de l'ordre de 10% par an.
Quant au salaire médian — la moitié des Français gagne moins, l'autre plus —, il stagne à 1.528 €.
Michel Godet, Hervé Mariton, Christine Boutin et, plus largement, ceux qui nous dirigent, font partie des 5% (si ce n'est pas 1%) des Français les mieux payés. Les éditocrates et autres experts qui passent sans arrêt à la télé pour formater notre pensée vivent déjà dans une bulle, mais notre gouvernement est mille fois pire : ainsi, il estime qu'on est vraiment riche qu'à partir de 11.000 € brut par mois et par personne. C'est donc sur cette base que quelque 100.000 foyers — à comparer avec nos 3,5 millions de Smicards + les 8 millions de personnes qui vivent en dessous du seuil de pauvreté… — dont les revenus d'activité et du patrimoine excèdent ce montant, devront contribuer à l'effort sur les retraites afin de défendre «l'équité de la réforme»... On nage en plein délire de nantis.
SH
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