Hier, patronat et syndicats se sont retrouvés pour une troisième séance de pourparlers autour de la nouvelle convention d'assurance chômage qui devrait entrer en vigueur le 1er avril pour une période de deux ans.
Dans la matinée, ont été évoquées de nouvelles mesures d'insertion comme la "préparation opérationnelle à l'emploi" chère à la CGPME, ainsi que l'élaboration d'un dispositif d'accompagnement spécifique des jeunes chômeurs où l'Etat devrait être interpellé afin de prendre part au financement.
Puis, l'après-midi, le Medef a pris les syndicats de court. Alors que, durant la précédente réunion du 9 février (qu'il a plus ou moins bâclée), il avait fait mine de considérer le montant de la dette cumulée (prévue à 11 milliards fin 2011) avant d'enclencher l'éventuelle diminution des cotisations patronales et salariales appelée de ses vœux, il a, cette fois-ci, exigé que les critères de cette baisse soient gravés dans le marbre de la future convention. Le chef de la délégation patronale, Patrick Bernasconi, a insisté pour qu'elle intervienne lorsque l'Unedic affichera, deux semestres d'affilée, un résultat d'exploitation de plus de 500 millions d'euros, peu importe l'étendue du déficit.
Les cinq organisations syndicales se sont, bien évidemment, insurgées. A l'issue d'une longue suspension de séance, la délégation patronale est revenue sans avoir changé d'un iota sa proposition, sifflant la fin de la réunion.
Coût du travail vs compétitivité
Le Medef a réaffirmé à la presse qu'«il n'était pas question de revenir» sur cette exigence. «J'ai souhaité rappeler aux syndicats qu'il n'y aura pas de signature [d'une nouvelle convention] par l'organisation patronale s'il n'y a pas de baisse de cotisations», a déclaré Patrick Bernasconi, justifiant que «si on limite le niveau d'endettement, la baisse des cotisations n'aura jamais lieu». Car pour le Medef, qui représente aussi dans ces négociations la CGPME et l'UPA, cette mesure «est un facteur de compétitivité pour les entreprises et de pouvoir d'achat pour les salariés»...
«C'était ubuesque ! Nous avons passé des heures à parler d'une baisse des cotisations au lieu d'avoir un vrai débat sur les demandeurs d'emploi», a commenté Maurad Rabhi de la CGT. «Le Medef est passé de co-gestionnaire de l'assurance chômage à une logique purement idéologique» (ce "coût du travail" qu'il faut à tout prix réduire, au nom de la sacro-sainte "compétitivité"), a affirmé Laurent Berger de la CFDT. «J'espère qu'ils ne gèrent pas leurs entreprises comme ils gèrent l'Unedic !» a-t-il ajouté. «On accuse souvent les syndicats d'être dogmatiques, mais on a le patronat d'un dogmatisme ! On est au degré zéro de la réflexion», s'est affligé Stéphane Lardy de FO.
Sabotage en vue
Les syndicats ont unanimement regretté une position jugée intransigeante, d'autant qu'en cas d'échec le gouvernement pourrait reprendre la main, un scénario qu'ils veulent à tout prix éviter.
La prochaine réunion, prévue le 10 mars, devait être — en théorie — la dernière. Pourtant, restent encore à traiter le rétablissement de l'AFDEF suite à la proposition de Xavier Bertrand, ainsi que l'intégration des conséquences de la réforme des retraites via une modification des bornes d’âges applicables aux seniors. De plus, on n'a toujours aucun écho sur une éventuelle prolongation de l'AER assortie de la mise en place d'une «nouvelle allocation pour les chômeurs âgés» qui ne pourront pas liquider leur retraite, telle qu'avancée par François Fillon. Quant aux débats concernant la modulations des cotisations sur les emplois précaires ou la mise en place de «droits rechargeables» pour les chômeurs qui enchaînent les contrats courts, le Medef les a fait reporter à 2013...
La tournure de ces négociations est véritablement scandaleuse. La colère gronde parmi les associations de défense des chômeurs (CGT-Privés d'emploi, AC!, MNCP, APEIS…) qui ne manqueront pas de multiplier les actions de protestation dans les jours à venir : nous vous tiendrons au courant.
SH
DERNIÈRE MINUTE : L'actuelle convention, qui expire ce 31 mars, a «en secret» été prorogée de deux mois supplémentaires, selon Marc Landré du Figaro. Le bras de fer devrait donc se poursuivre encore quelques semaines.
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