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Accueil Social, économie et politique Smic : un salaire de misère toujours trop élevé pour les ultralibéraux

Smic : un salaire de misère toujours trop élevé pour les ultralibéraux

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Le «groupe d'experts sur le Smic», constitué d'adeptes de la déflation salariale, recommande à François Hollande de n'accorder aucun coup de pouce au salaire minimum le 1er janvier prochain. Gageons qu'ils seront écoutés...

Ce «groupe d'experts» est piloté par Paul Champsaur, haut fonctionnaire marqué à droite. Depuis mai 2009, lui et ses acolytes [1] — des idéologues fort bien payés et à mille lieues de savoir ce que signifie vivre avec 1.117 € net par mois —, se chargent de pondre des rapports annuels régurgitant l'affirmation fallacieuse selon laquelle augmenter le Smic détruirait des emplois dans un contexte de «coût du travail» déjà beaucoup trop élevé... Une imposture qu'il faut impérativement dénoncer.

Ce qui nuit à l'emploi, c'est le manque d'activité

Et ce manque d'activité ne peut que s'accentuer quand, au nom d'une «compétitivité» aveugle, on réduit inlassablement le pouvoir d'achat des populations, entretenant le même cercle vicieux que celui qui a provoqué la crise des subprimes et son terrible effet domino, crise systémique majeure liée à l'explosion de l'endettement privé et des inégalités sociales.

Pour relancer l'activité, sachant que 80% de l'économie française s'appuie sur la demande intérieure (ce qui n'est pas une tare !), au lieu de persister dans la déflation salariale à l'origine de cette crise, il faut au contraire redonner du pouvoir d'achat aux ménages. On peut non seulement augmenter leurs revenus —  rappelons que depuis le virage néo-libéral des années 80, 10 points de PIB ont été transférés des salaires aux profits —, mais aussi réglementer drastiquement un marché de l'immobilier gangréné par la spéculation et dont les prix, qui ont doublé en quinze ans, plombent le budget des Français.

Ecoutez Philippe Askénazy, spécialiste de l'économie du travail, expliquer pourquoi augmenter le salaire minimum ne menace pas l'emploi et la compétitivité en France :



Enfin, comme le démontre ici l'économiste Denis Clerc, les destructions d'emplois sont à chercher du côté de la crise et du fonctionnement du capitalisme, pas du côté du Smic.

Le «coût du travail» des Smicards est quasi nul

On se garde bien de dire que, grâce aux allègement Fillon sur les bas salaires (de 1 à 1,6 Smic), aubaine qui coûte chaque année 21 milliards d'euros à l'Etat, la France est non seulement championne du salaire minimum (notre taux de Smicards est le plus élevé des pays de l'OCDE) et son salaire médian se tasse à 1.675 € net par mois (la moitié des salariés français gagne moins), mais ses entreprises ne versent quasiment aucune cotisation sociale pour les Smicards (elles sont prises en charge par la collectivité). Donc, en l'espèce, ceux qui prétendent qu'une hausse du Smic augmenterait le prix du travail sont des menteurs.

Sans compter qu'à ces allègements va se greffer dès 2013 le CICE, «crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi» qui devrait réduire encore de 4% à 6% le prix du travail sur les rémunérations jusqu'à 2,5 Smic. Les salariés, eux, n'en verront pas la couleur : c'est l'entreprise, censée en faire bon usage, qui empochera le cadeau sans contreparties. Comble du cynisme, salariés et ménages devront financer en 2014 cette nouvelle niche via une hausse de la TVA, notamment de son taux intermédiaire qui sera augmenté de 3 points : outre la restauration et les travaux de rénovation des logements, les livres ou les tickets de cinéma, la TVA à 10% vise aussi les transports, les cantines scolaires ou les médicaments non remboursables. De quoi mettre toujours plus à mal le pouvoir d'achat des Français et, par ricochet, l'activité. On n'en sort pas !

Zéro coup de pouce au 1er janvier

Mais ces «experts» à œillères ne voient pas les choses ainsi. Suivant les recommandations du FMI, ils persistent à prendre le problème à l'envers, obéissant au bon vieux dogme austéritaire dont on sait où il nous mène. Sans surprise, ils préconisent “une gestion prudente des hausses de Smic” en “limitant le relèvement au mécanisme légal de revalorisation automatique”. En clair, ils recommandent au gouvernement d'éviter tout coup de pouce et de se cantonner à l'évolution des prix à la consommation… qui ne devrait pas excéder 1,9% cette année. La revalorisation du 1er janvier sera donc infime. Tant pis si, au 1er janvier, les prix du gaz (entre 2% et 3%), des timbres-poste (+2,8%) ou les tarifs des assurances — pour ne citer qu'eux… — augmenteront bien au delà.

Dans leur rapport, les «experts» s'opposent au projet de François Hollande d'indexer également le Smic sur une part de la croissance. Ils ont raison : cette énième promesse électorale totalement fumeuse est techniquement intenable. En la mettant dans son programme, Hollande pensait se débarrasser de la décision du coup de pouce… c'est loupé.

Autre préconisation de ces «experts» : envisager une évolution des règles qui prendrait en compte “l’homogénéité géographique” et “l’homogénéité du Smic selon l’âge” — bref, un Smic "à la carte" atomisé pour mieux l'enterrer —, mais aussi à remettre en question “le principe même d’une revalorisation automatique”. Ainsi rejoignent-ils l'une des préconisations des technocrates de Bruxelles qui, en avril dernier, ont pondu un texte visant à relancer l'emploi en Europe, notamment en créant des Smic à géométrie variable suivant les branches d'activité.

Heureusement que le mandat de ce «groupe d'experts sur le Smic», nommé par le gouvernement Fillon, arrive à expiration (il était prévu pour quatre ans). Un "Club des Cinq" qui ne manquera à personne.

SH

[1] Ils s'appellent Gilbert Cette, directeur des études économiques de la Banque de France et membre du Conseil d'analyse économique, Martine Durand, directrice adjointe de l'emploi à l'OCDE, Francis Kramarz, directeur du Crest et professeur à l'École polytechnique, et Etienne Wasmer, professeur d'économie à Sciences Po.
Ces gens, estimant que le Smic “n’est pas un moyen efficace pour réduire la pauvreté et les inégalités”, suggèrent de “s’appuyer sur des mesures fiscales et des prestations sociales ciblées [comme le RSA "activité"] plutôt que sur un salaire minimum élevé et uniforme”. Ils affirment également que “les allégements de cotisations sociales ont fait la preuve de leur efficacité [???] et doivent par conséquent être maintenus”... Objectif : soulager toujours plus les entreprises du «coût du travail» en le transférant progressivement sur la collectivité; un véritable détournement de fonds qui est, hélas, en bonne voie.

RAPPEL : Depuis juillet 2012, le Smic horaire s'élève à 9,40 € brut, soit 7,36 € net.
Le Smic mensuel brut s'élève à 1.425,67 € pour une durée légale de travail de 35h par semaine, soit 151,55 heures par mois. En net, cela ne fait plus que 1.117.73 €. Mais comme dit Gilbert Cette, “vivre avec le Smic à Paris n'est pas la même chose qu'à Guéret dans la Creuse. Cela mérite réflexion”, n'est-ce pas ?
www.smic-horaire.net




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