C'est à la Une de tous les JT et de toute la presse : un rapport accablant de l'AMF (Autorité des marchés financiers) transmis au parquet de Paris dénonce un "délit d'initié massif" chez EADS : 1.200 cadres dont 21 dirigeants - parmi lesquels Noël Forgeard, Thomas Enders, Jean-Paul Gut, Arnaud Lagardère (le "frère" de Nicolas Sarkozy), Manfred Bischoff… - ainsi que les deux principaux actionnaires Lagardère & DaimlerChrysler, ont revendu leurs actions alors au plus haut en toute connaissance de cause, et ce juste avant que les "difficultés" rencontrées par Airbus (en vérité, de graves erreurs de stratégie industrielle) ne soient rendues publiques. Le "laxisme" de l'Etat est également pointé du doigt en la personne de l'ex ministre des Finances Thierry Breton, lui-même déjà mouillé dans l'affaire Rhodia...
Ce vaste délit d'initiés a provoqué l'effondrement sans précédent de l'action EADS. Montant de l'opération : plus de 90 millions d'euros de plus-values !!! Selon l'AMF, Noël Forgeard et ses enfants ont vendu près de 300.000 titres, dégageant au passage la coquette somme de… 6,7 millions. Le DRH Jussi Itavuori aurait de son côté écoulé 95.000 titres avec à la clé un bénéfice de 1,2 million. Jean-Paul Gut, le directeur général délégué, a passé 50.000 actions pour un gain de 737.000 €. Et François Auque, le directeur de la branche EADS Space, se serait délesté de 10.000 titres pour 114.000 €. Quant à Lagardère et Daimler, ils ont récolté chacun environ 2 milliards d’euros lors de la transaction, mais on ignore la part des plus-values.
Et pendant ce temps, 10.000 emplois doivent être sacrifiés chez EADS !
A côté, l'abus de confiance dont est soupçonné Denis Gautier-Sauvagnac, qui a été perquisitionné aujourd'hui par la brigade financière à son domicile ainsi qu'au siège de l'UIMM, l'organisation patronale dont il est le président, passe pour de la petite bière puisqu'il ne concerne que 5,64 millions d'euros (1), mystérieusement retirés en liquide entre 2000 et 2007. Il n'empêche que cet homme ô combien distingué, qui est vice-président de l'Unedic et négociateur en chef du Medef partout où il s'agit de serrer la ceinture et grignoter des droits aux salariés et aux chômeurs, n'est désormais plus crédible. Comme tous les autres, il doit être démis de ses fonctions (2).
Quel bel exemple de probité, de compétence et de mérite nous donnent ces personnages aussi puissants que riches, ces "forces vives de la nation" qui exhibent leur réussite avec plus ou moins d'arrogance et se permettent de faire la leçon à ceux qu'ils exploitent ou qu'ils mettent sur la paille ? Quels modèles sont-ils pour la France ? Et, surtout, quelle commune mesure y a-t-il entre ces sommes faramineuses ainsi empochées ou détournées face aux petites allocations que perçoivent les chômeurs et les RMIstes ? Ils serait temps que les Français ouvrent les yeux et cessent de se tromper d'ennemis.
A quand un «Grenelle» contre les rentiers corrompus et autres patrons voyous ?
(1) Ce qui représente 5.600 salaires au Smic ou 14.000 mois de RMI : on vous laisse faire le compte pour le butin d'EADS... DERNIÈRE MINUTE => selon L'Express de vendredi, ce ne sont pas 5,64 mais 15 millions d'euros qui auraient été sortis des caisses de l'UIMM !
(2) Soutenu par la présidente du Medef, Denis Gautier-Sauvagnac est maintenu à son poste : lire en commentaire…
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