Vive la crise ! Ah, la crise, sa dette et son chômage de masse... Quelle aubaine plus fantastique pour anéantir les acquis du salariat… avec son consentement !
Hier, nous avons mis en ligne un nouveau sondage. Il est bien sûr trop tôt pour se prononcer mais nous remarquons, au vu des premières réactions de nos lecteurs, qu'ils sont sans illusion : il ne se passera rien, même si la crise redouble de vigueur et que 2012 promet d'être une année aussi noire que 2009 en termes de destructions d'emploi; même si les politiques d'austérité vont nous foutre complètement sur la paille.
«La guerre des classes existe et c'est la mienne, celle des riches, qui la mène et qui est en train de la gagner», avait dit l'homme d'affaires Warren Buffet, première fortune des Etats-Unis et troisième plus grande fortune du monde. Donc, en effet, IL NE SE PASSERA RIEN. La preuve par deux.
Lu dans Télérama cette semaine :
Le Syndicat Alternatif des Acteurs (SAA) propose une baisse des salaires des comédiens qui pratiquent le doublage des programmes de télévision. «L’objectif est d’arriver à une baisse de 30% des salaires afin d’être compétitifs et de restaurer l’emploi en France, non seulement celui des acteurs, mais celui de toute la filière», explique le SAA dans un communiqué suite aux fréquentes délocalisations dans le secteur, particulièrement en Belgique. Cet attrait pour le marché belge s'explique notamment par des coûts salariaux plus faibles : le doublage en Belgique coûte environ 40% moins cher qu'en France. Le SAA espère ainsi relocaliser une partie du doublage en France.
Estomaquant ! Un syndicat qui demande une baisse de 30% des salaires de sa profession pour contrer une délocalisation, n'est-ce pas le monde à l'envers ?
On continue...
Lu dans La Tribune de ce jour :
L'horizon s'éclaircit pour l'usine PSA de Sevelnord
Trois des quatre syndicats de l'usine ont donné leur feu vert ce jeudi à un accord dit de "compétitivité", qui était en discussion depuis deux mois, sur "l'adaptation des conditions de travail, la pérennisation des emplois et le développement de Sevelnord". […] L'accord, qui porte notamment sur une gestion plus flexible des RTT et du temps de travail des salariés, «permet la pérennité de l'entreprise», s'est félicité Jean-François Fabre, délégué syndical FO. La direction s'est engagée à ce qu'il n'y ait pas de licenciements économiques pendant la durée de trois ans, reconductible pour deux ans, ont souligné les syndicats.
Un "horizon qui s'éclaicit" alors que ce sursis entraînera, pour les 2.700 ouvriers, une détérioration sans précédent de leurs conditions de travail ? Que leur paie sera gelée pendant deux ans et qu'ils devront accepter mobilité et flexibilité accrue en fonction des cadences ?
La CGT, qui a refusé de le signer et exige un référendum dont l'issue est connue d'avance tant la peur du chômage est forte, avait averti : «On est un laboratoire de ce que veut faire le patronat, exactement dans la veine des anciens accords compétitivité-emploi [1]. L’UIMM [2] lorgne de près sur ce qui se passe à Sevelnord». Trois fois hélas !!! Les autres se sont aplatis : la CFE-CGC, FO et le syndicat maison SPI-GSEA ont voté le texte «sur le dos des salariés à la veille des congés», ouvrant ainsi la brèche aux futurs régressions sociales et saccages des droits qui s'exerceront par ailleurs. Grâce à ces collabos et à la lâcheté générale, patronat et actionnaires remportent une nouvelle victoire. La défaite est totale pour le monde du travail.
Cela ne vous rappelle-t-il pas l'histoire des Conti et de tant d'autres qui, après s'être résignés aux nombreuses concessions demandées par leur direction pour sauver leurs emplois, se sont, au final, quand même retrouvés sur le carreau ? Ont-ils compris que, s'ils s'étaient révoltés et battus, ils auraient peut-être changé la donne ? «Ceux qui se battent peuvent perdre; ceux qui ne se battent pas ont déjà perdu», disait Bertold Brecht.
La soumission, c'est l'échec assuré sur toute la ligne ! Quand on se soumet, on ne récolte que mépris, trahisons et misère. Quand on se soumet, on ne sacrifie pas seulement sa dignité : on sacrifie sa classe sociale, son avenir et celui de ses enfants.
SH
[1] Suggérés par le Medef et proposés en janvier par Nicolas Sarkozy, ils consistaient à permettre aux entreprises, en contrepartie d'engagements de maintien dans l'emploi à court terme, de moduler le temps de travail et la rémunération des salariés au gré des aléas de la conjoncture sans avoir à modifier leurs contrats, ce qui induisait plus de sécurité juridique pour les employeurs, mais plus d'insécurité et de flexibilité pour les travailleurs.
Bien évidemment, une fois la crise passée, on nous aurait dit que, pour des raisons de compétitivité, il ne faut surtout pas revenir en arrière !
Le 11 juillet dernier, Jean-Marc Ayrault a a officiellement mis fin à la négociation des «accords compétitivité-emploi» version Sarkozy, qu'il compte remplacer à la rentrée par une négociation sur «les conditions d'une meilleure sécurisation de l'emploi». Selon des observateurs, les accords compétitivité-emploi ne sont pas morts. Il faudra donc rester vigilants. Mais, vu le manque de combativité des salariés et l'inféodation de certains syndicats et socialistes aux désirs patronaux, on est vraiment mal barrés.
[2] L'Union des industries et métiers de la métallurgie, puissante branche du Medef connue pour ses retraits suspects d'argent en liquide et sa caisse noire visant à «fluidifier les relations sociales»... Son président est Frédéric Saint-Geours, qui est également… directeur des marques chez PSA et président de PSA Finance (car PSA ne fabrique pas que des voitures : le groupe fait aussi dans la banque et l'assurance, c'est plus rentable).
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