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Accueil Social, économie et politique Smic ou RSA : le choix cornélien du charitable Martin Hirsch

Smic ou RSA : le choix cornélien du charitable Martin Hirsch

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L'homme qui inventa le rSa ET gagne actuellement huit Smic par mois se demande s'il faut donner un coup de pouce au Smic OU au rSa… "activité", bien sûr.

Parfois, il faut savoir se taire. Mais Martin Hirsch, lui, ne sait plus. Autrefois discret, ce haut fonctionnaire, techno-bureaucrate au visage débonnaire, a toujours su mener à bien sa carrière en ménageant la chèvre et le chou puisqu'il est aujourd'hui président de l'Agence du service civique, dernier cache-misère de l'emploi des jeunesil gagne (théoriquement) 9.200 € par mois, après avoir été Haut commissaire aux «solidarités actives» sous Nicolas Sarkozy, certainement par souci d'ouverture — car, même si on se prétend «homme de gauche», on peut penser que la droite, elle aussi, compte quelques bonnes âmes qui tentent de lutter contre les pauvres la pauvreté de la même façon qu'elle s'efforce de lutter contre les chômeurs le chômage; et puis, quoiqu'il arrive dans ce monde "moderne", il faut s'adapter, hein.

Voyez un peu... Tel un administrateur cumulard percevant moult jetons de présence, l'ex président d'Emmaüs France et ex directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), membre du Conseil d'Etat depuis 2006, est également vice-président de l'Association pour la recherche sur le cancer (ARC), membre du comité consultatif de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE), administrateur de l'Agence européenne des médicaments, membre du forum de l'Autorité européenne de sécurité des aliments et du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (CNLE). Etourdissant !

Martin Hirsch, le retour

Après avoir œuvré avec l'UMP afin d'enterrer le vieux RMI de Rocard et pondre un RSA qui n'a aucunement amélioré la condition de ses allocataires, bien au contraire, sans parler du fiasco de son RSA "activité", le voici qui, benoîtement, malgré ses trahisons à la cause des «pauvres» et des plus «modestes» qu'il a faussement prétendu défendre, tente de saisir un micro (on y prend goût). Profitant du débat sur une augmentation du Smic bridée depuis cinq ans par le précédent gouvernement plus-anti-social-tu-meurs auquel il collabora sans scrupule, tirant à lui un bout de couverture, il ramène sa fraise dans Les Echos.

Régurgitant la vulgate mensongère de l'internationale ultralibérale — lui qui a soutenu et voté Hollande —, il estime que «le premier problème du Smic est de surenchérir le coût du travail des personnes les moins qualifiées, c'est-à-dire de celles qui sont le plus menacées par le chômage, qui occupent les emplois les plus soumis à la concurrence des coûts de main-d'oeuvre, y compris à l'égard de nos partenaires européens» (en effet, les technocrates de Bruxelles veillent au grain)... Or, nous savons que 99% des Smicard-e-s occupent des emplois non délocalisables : grande distribution, nettoyage, services à la personne, restauration, etc. Quant au surenchérissement du coût du travail sur ces emplois si peu valeureux qualifiés dont l'Etat serait le premier à supporter la charge (ce qui est vrai : une hausse de 1% du Smic lui coûterait 1,1 milliard d'euros), Martine Aubry l'a affirmé : «Nous pensons qu'il y a d'énormes marges de manœuvre. Il faut d'abord faire rentrer des impôts complémentaires de ceux qui ont eu tant de privilèges aux dépens des autres». Mais Martin Hirsch n'est pas dupe. Il sait, lui aussi, qu'une grande réforme fiscale, pourtant nécessaire au rétablissement d'une vraie justice sociale dans ce pays, n'est pas au goût du jour.

C'est pourquoi il prend les devants, revenant sur la bonne vieille théorie des Cahuc, Cette et Zylberberg, autres technocrates qui jugent que le Smic n'est pas «un moyen efficace pour réduire la pauvreté et les inégalités» et suggèrent de «s’appuyer sur des mesures fiscales et des prestations sociales ciblées plutôt que sur un salaire minimum élevé et uniforme». Outre que les Smicard-e-s apprécieront le caractère «élevé» de leur salaire minimum, ces analystes patentés proposent, depuis plusieurs années, ni plus ni moins de transférer une partie du coût du travail des entreprises vers la collectivité, notamment en substituant le RSA au Smic. Un travail de longue haleine visant à modeler nos esprits. Consternant !

Heureux les simples d'esprit

Depuis l'irruption de Martin Hirsch sur la scène politique, nous avons toujours dénoncé le mal-fondé du RSA, le dilettantisme de son créateur ainsi que son credo du “C'est mieux que rien” qui mène toujours au pire, faisant de lui un grand spécialiste de l'emploi bradé. Car pour Martin Hirsch, il n'est jamais question de remettre en cause l'ordre établi, c'est-à-dire une répartition des richesses de plus en plus injuste/scandaleuse et sa conséquence : un creusement des inégalités qui mène droit aux crises. Selon lui — c'est une fatalité, comme nous l'a enseigné la religion catholique —, même s'il convient d'améliorer leur sort pour se donner bonne conscience, dans toute société il faut hélas des pauvres et ceux-ci doivent se contenter d'un gâteau rétréci/rassi, point. Il n'est donc pas question d'augmenter le Smic ET le RSA "activité" (parce que les minima sociaux de ceux qui ne travaillent pas, ça pue) pour redonner du pouvoir d'achat à des millions de Français «pauvres», sinon «modestes» et relancer l'activité, mais de choisir entre l'augmentation de l'un OU de l'autre; certainement pas «les deux, mon général !» : restons pragmatiques.

Mais c'est avec joie que nous lisons la réaction de L'Expansion, magazine économique que l'on ne peut qualifier de gauchiste, qui démonte son idée consistant à donner, plutôt qu'au Smic et au nom de «la parité des revenus» (elle est bien bonne, celle-là !), un coup de pouce au RSA "activité", «un instrument plus efficace, mieux ciblé» qu'il a lui-même «conçu pour améliorer les ressources des salariés modestes sans peser sur le [sacro-saint] coût du travail». Sauf que ce coup de pouce au RSA "activité" ne concernerait que 450.000 «travailleurs pauvres» alors qu'une revalorisation du Smic — «diluée» selon lui — touchera directement 2,5 millions de salarié-e-s et indirectement quelques millions de plus, explique L'Expansion. Il est en effet démontré qu'une hausse du Smic se répercute intégralement dans l'année qui suit sur les salaires proches de ce minimum (entre 1,1 et 1,2 Smic), rappelle-t-il, puis de façon dégressive au-delà, pour s'annuler à 2 Smic. Or, les trois quarts des salariés français gagnent moins de 2 Smic... Et toc !

Enfin, l'OFCE rappelle qu'à l'instar de toutes les prestations sociales, le RSA activité n'ouvre pas de droits à la retraite ou au chômage, ceux-ci s'acquérant via un salaire et des cotisations. Or, plus les salaires sont élevés, meilleurs sont ces droits. De plus, en terme de dignité, le niveau du Smic représente la valeur qu'une société donne au travail alors que les prestations sociales ciblées sur les plus pauvres mettent les individus concernés dans une position d'«assistés».

Nous conseillons donc à Martin Hirsch, même s'il confirme involontairement les faibles intentions du nouveau gouvernement (le changement, le vrai, ce n'est pas pour maintenant), de ne pas se diluer dans des déclarations ineptes. Ainsi pourra-t-il poursuivre tranquillement sa carrière de techno-bureaucrate de gauche qui pense à droite sans se compromettre.

SH

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Mis à jour ( Mercredi, 27 Juin 2012 17:13 )  

Commentaires 

 
0 # tristesir 2012-06-06 08:56 Qu'ils augmentent les montants du SMIC et du RSA de base.

S'ils insistent pour baisser le taux de restitution du RSA activité, je suis preneur aussi 8)
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0 # La môme 2012-06-06 11:12 Est-ce bien étonnant, tout ça, hein ?

Hirsch, ex boss d'Emmaus, bien catho, membre du gouvernement Sarkozy, où on donne des miettes aux esclaves… Un peu comme mémé Chirac avec ses pièces jaunes. Les millions à Bettencourt, les pièces jaunes aux miséreux.

Les derniers seront les premiers, qu'ils disent. Vivement le cimetière, quoi.

Comme disait Rosa Luxembourg, "L’important, ce n’est pas que les esclaves soient mieux nourris, c’est qu’il n’y ait plus d’esclaves."
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0 # Galuel 2012-06-06 11:18 Transformer le RSA en Revenu de Base de par exemple 600 € / Citoyen. Ainsi son augmentation de 100 € touchera tout le monde, conformément aux Droits de l'Homme, et invalide toutes ces discussions stériles ! http://www.revenudebase.info
Qui donc se soucie des Droits de l'Homme ici ?
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0 # guillaume ereteo 2012-06-06 11:41 Personne ne recherche la sécurité de l'emploi, mais plutôt la sécurité de se loger et de se nourrir: bref le droit de vivre.
En renforçant le RSA on converge vers un revenu de base pour tous tout en préservant l'avantage financier de travailler.
Les 5 ans de Sarkozy ont été très douloureux pour la France, mais le RSA est une réforme positive, ce qui est négatif c'est son association à la traque à l'assistanat qui laisse croire qu'il faut mériter le droit de vivre.
Je soutiens donc complètement Martin Hirsh sur cette position. En offrant à chacun un minimum pour se loger et se nourrir sans condition, nous réintroduirons une vrai concurrence sur le marché du travail, au profit des salariés qui ne seront plus obligés d'accepter n'importe quel travail pour vivre.
C'est une sorte de dividende universel qui permet à chaque citoyen de récolter les fruits du progrès en le libérant du travail.
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0 # De passage 2012-06-06 12:23 @guillaume ereteo,

Ce que vous dites est hallucinant ! Vous croyez vraiment qu'avec le RSA (activité ou socle), on peut se permettre de ne plus chercher d'emploi ?
Se loger et se nourrir avec moins de 500 euros par mois (RSA socle), vous le faites comment ce miracle ?

Ces minimas sociaux ne permettent pas d'atteindre la sécurité : se loger et se nourrir.

Déjà qu'un SMIC, le permet tout juste…
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0 # superuser 2012-06-06 14:53 Ohé, ereteo ! Relisez. Martin Hirsch veut juste filer un coup de pouce au seul RSA "activité", complément de revenu qui n'est actuellement perçu que par 464.000 travailleurs pauvres.

Et puis Martin Hirsch, inventeur du RSA, n'a pas cherché à abolir la coercition liée à son usine à gaz, bien au contraire. Pour lui, toute charité doit se justifier et il y a belle lurette que le simple droit de vivre, dans son esprit, s'est substitué à la logique pure et dure des "droits" et des "devoirs" version UMP.

Oui, il faut augmenter les minimas sociaux : leur montant actuel est indigne, ne permet pas de survivre et encore moins de chercher du travail dans les meilleures conditions. Oui, il faut un revenu universel et inconditionnel.
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0 # guillaume ereteo 2012-06-06 16:07 ne vous énervez pas :-)

Renforcer le RSA 'activité' permet de converger vers un revenu de base. Ce n'est pas suffisant, mais c'est un début.
le RSA est une avancée pour arriver au revenu de base par rapport au RMI car il permet d'avoir des revenus d'activité en plus de l'allocation. Par contre il serait doux que le calcul soit RSA socle + 100% du revenu d'activité pour tous sans condition, ce qui augmenterait automatiquement le revenu des smicards, non?
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0 # superuser 2012-06-06 16:20 De toutes façons, ni le RSA "activité", ni le RSA "socle", ni les minima sociaux en général ne seront revalorisés. Quant au Smic, le "coup de pouce" ne dépassera pas 5%. Ne nous illusionnons pas : avec le gouvernement Hollande, le changement, le vrai, ce n'est pas pour demain ! Quant à Martin Hirsch, il cherche juste à se faire voir pour qu'on ne l'oublie pas alors qu'il ferait mieux d'empocher en silence ses 9.200 € de salaire. Répondre | Répondre avec citation |
 
 
0 # guillaume ereteo 2012-06-06 16:53 je n'ai jamais eu l'illusion d'un grand changement (on avancera peut être un peu sur la corruption). En tout cas je soutiendrai tout mouvement (aussi infime soit il) qui nous rapprochera du revenu de base. S'il est un jour en place je me battrai ensuite pour qu'il soit suffisant pour se loger et se nourrir. Répondre | Répondre avec citation |
 
 
0 # superuser 2012-06-06 17:19 Ce que je voulais vous dire, c'est que Martin Hirsch est un ennemi du revenu universel et inconditionnel et qu'il ne défendra jamais un tel projet : pour lui, toute allocation est considérée comme une aumône qui mérite contrepartie. Contrairement aux apparences, cet homme n'est pas un progressiste mais un conservateur pur jus. Il ne faut pas le soutenir. Répondre | Répondre avec citation |
 
 
0 # superuser 2012-06-26 23:46 L'OFCE rappelle que le RSA activité, comme toutes les prestations sociales, n’ouvre pas de droits à la retraite ou au chômage, ceux-ci s'acquérant via un salaire et des cotisations. Or, plus les salaires sont élevés, meilleurs sont ces droits.
De plus, en terme de dignité, le niveau du Smic représente la valeur qu’une société donne au travail alors que les prestations sociales ciblées sur les plus pauvres mettent les individus concernés dans une position d’assistés :

www.ofce.sciences-po.fr/blog/?p=2139
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